ESSAI – MERCEDES AMG C43 (2023) : DOIT-ON êTRE CHOQUé ?

Les plus

  • Chronos flatteurs…

  • Agilité, efficacité châssis

  • Contenu technologique

  • 4 roues motrices, typée propulsion

Les moins

  • … mais très peu de progrès

  • Gestion de boite, à-coups

  • Sonorité, caractère en régression

  • Fermeté excessive

Par Antoine Arnoux

Samedi 27 mai 2023

Deux cylindres en moins, un gros turbo perfectionné et une dose d'électrification, voilà ce que l'on découvre en soulevant le capot de la nouvelle C43 AMG. Le modèle d'accès à l'univers AMG sur la Mercedes Classe C a donc abandonné le très expressif V6 de la précédente au profit d'un cas d'école de downsizing ultra-poussé. 2 litres de cylindrée et 408 ch, ça interpelle... Mais tout dépend d'où ils viennent. Le rendement est spectaculaire, le bénéfice plus discutable.

Juste pour le clin d'œil historique, qui a de quoi faire sourire, rappelez-vous bien de la première Classe C à porter le nom de C43 AMG : en 1997, AMG, le préparateur passé depuis peu dans le giron Mercedes, greffait un V8 de 306 ch dans la W202. La très placide et bourgeoise berline familiale devenait une sorte de tueuse de chronos sans avoir l'air d'y toucher, rivalisant (sans la dominer) avec la BMW M3 E36. A l'époque, les chiffres voulaient dire quelque chose et le bloc atmo cubait réellement 4,3 litres. Ici, tout a été divisé par deux : la C43 développée sur la cinquième génération de Classe C cache un 4 cylindres, moitié moins gros (2 litres !). Evidemment, l'appeler C20 AMG sonnerait moins ronflant... Réduire la cylindrée et augmenter le rendement à coup de gros turbos n'est pas nouveau, mais le downsizing a bien atteint un cap extrême ces derniers temps. C'est d'ailleurs une première : il n'y aura aucun 6 cylindres (sauf surprise) sous le capot d'une Classe C, pour la première fois.    

 

Pour éviter toute méprise, rappelons que la C43 a changé de posture en 25 ans. En réalité, la nomenclature a été ressortie du placard quand Mercedes s'est mis à proposer deux AMG au catalogue avec la précédente Classe C : la C43 assure désormais le rôle d'AMG "soft", sorte de trait d'union entre la gamme classique et la C63 dotée du V8 4 l biturbo dérivé de l'AMG GT. Enfin, plus maintenant. La hiérarchie a été reconduite sur l'actuelle Classe C, qui aura bien droit à une C63, tout aussi spectaculaire... dans un autre registre. Un motif de plus pour râler ? Elle aussi se contentera d'un 4 cylindres : le même que celui qui sévit dans la C43, mais dopé par un gros moteur électrique portant la puissance à 680 ch ! C'est un autre sujet, et vous pleurerez plus tard.

Plus puissant, plus brutal, pas plus rapide

Autre revirement de situation, depuis les premières Mercedes AMG : dans les années 90, seuls quelques discrets logos trahissaient leur pedigree. C'est l'inverse aujourd'hui ! Quatre sorties d'échappement pour un quatre cylindres, on n'a pas vu plus outrancier depuis la Civic Type R de 2015... ou la Classe A45 AMG. Tiens donc, le 2 litres (M139 en interne pour les intimes) provient précisément de celle-ci, légèrement dégonflé au passage (421 ch sur la Classe A), doublé d'une micro-hybridation 48V (avec alterno-démarreur permettant un "boost" ponctuel de 14 ch) et surtout d'un gros turbo électrique. Le petit logo "Electrified" sur les ailes ne fait donc pas référence à une quelconque hybridation, mais bien à la suralimentation. Le turbo n'est pas entrainé uniquement par les gaz d'échappement, et reçoit le soutien d'un petit moteur électrique. Mercedes ne se prive pas de rappeler que le procédé technique dérive de la F1 (moins glorieux, les V6 TDI Audi ont aussi eu droit à une technologie approchante)... 408 ch au final, soit 204 ch au litre !

 
La C43 se distingue par la calandre dite "Panamericana", les jantes et les 4 sorties d'échappement, notamment. La berline débute à 78.650 € (+1.500 € pour le break) hors malus : 20.396 € minimum. Presque 100.000 € pour un 4 cylindres, vraiment ?

Le principe n'est pas nouveau, mais présente quelques avantages très concrets : en assurant le maintien en charge constant du turbo, le temps de latence est quasi totalement gommé, en accélérations à bas régime ou remise des gaz, en forte relance. Effet immédiat, c'est redoutable ! Le hic : la boite 9 rapports ne suit pas toujours, notamment à rythme modéré. Trop de couple, trop tôt, pour la transmission qui hésite entre seconde et troisième et inflige quelques à-coups pas très élégants. Tout s'arrange, à des allures un peu plus énervées. Oui, ça fonctionne, le 4 pattes pousse fort et partout, très tôt et reprend avec poigne. Seulement, ce petit bouilleur n'a pas évidemment plus rien de commun avec l'ancien V6 de 3 litres (367 ch, puis 390 ch en fin de carrière). Impossible de rivaliser avec le 6 cylindres, bien plus feutré et docile en bas, puis rageur dans les tours. Le "4 pattes" a beau gronder et crépiter comme un beau diable, la poussée est bien moins sensationnelle et plus linéaire. Plus décevant : si la sonorité (parfaitement artificielle, accentuée par l'échappement) et le caractère rugueux de ce moteur ont leur place dans une compacte teigneuse, ce manque de raffinement dénote dans une berline de ce rang. Surtout si elle facture ses services 78.650 €, minimum !

Face au chrono, le gain de puissance n'est guère flagrant. Un petit dixième grappillé de 0 à 100 km/h (4,6 s), et c'est tout... sur quasiment tous les autres exercices, surtout en relances à haute vitesse, le 4 cylindres régresse par rapport au V6. En cause, son couple légèrement moins élevé (500 Nm à 3.300 trs/mn, contre 520 Nm à 2.500 trs pour l'ancien 3 litres), l'étagement de la boite et, accessoirement, la prise de poids : la C43 cru 2023 accuse 1.765 kg à vide, soit 60 kg de plus que la devancière. L'équipement et la technologie embarquée, notamment niveau châssis, y sont pour quelque chose.       

 
Le caractère moteur déçoit, mais la C43 console (en partie) avec un châssis soigné et une impressionnante agilité. Verrouillée au sol ! 4 roues directrices et transmission intégrale font oublier le poids et le gabarit...

La revanche dans les virages

Quand on pense à ce que BMW nous sert avec le 6 en ligne de la M340i (moins puissante, mais plus performante et moins chère : 374 ch, 4,4 s pour 72.800 €), la comparaison est cruelle. Même une Audi S4, pourtant convertie au V6 TDI depuis quelques temps, délivre un agrément plus homogène (c'est dire !) et des chronos comparables. Mis à part ces deux rivales de toujours, la C43 n'a pas de concurrente directe sur ce segment, à puissance similaire. Chez les rares berlines de caractère, citons toutefois la Peugeot 508 PSE, certes en retrait en puissance et performances (360 ch, 5,2 s), mais moins chère (71.950 €) et mieux construite que la Classe C (si si, pour de vrai).

Tout n'est pas noir au volant de cette très contrastée C43. Les chronos tout de même costauds seront appréciables lorsqu'il faudra se rendre au plus vite chez l'ostéopathe, en raison d'une suspension excessivement raide même en mode Confort. Allez, on retrouve un peu de bonne humeur en haussant le rythme : la fermeté désagréable à basse vitesse laisse place à un toucher de route plus acceptable à bonne allure.

 
Sièges et inserts carbone sont spécifiques à la C43. L'habitacle présente bien, mais comme sur toutes les Classe C, la finition est inégale : beau matériaux y cotoient des éléments bas de gamme et pas toujours bien ajustés.

Toujours ferme et verrouillé, sans gros mouvements de caisse, le châssis de la C43 est athlétique. Ça motrice fort, sans piège, même en remise des gaz très (trop ?) précoce. Bien, d'autant que le 4Matic est ici conçu pour privilégier l'arrière par défaut (31/69), et conserve donc un tempérament de propulsion, sans excès et plutôt plaisant. Le gros point de progrès vient surtout des liaisons au sol, servies par un train avant au millimètre et des roues arrière directrices bien calibrées. Pour une fois, cet artifice technique n'est ni trop intrusif, ni trop artificiel dans son feeling : le bénéfice sur l'agilité et la stabilité est bien réel. Si seulement le confort pouvait être en phase avec le reste... et sa ligne. Reconnaissons-le, elle a une certaine allure, cette Classe C. Presque au point de faire penser à une Alfa Romeo Giulia.

Prendre des kilos pour gagner des grammes

On aurait presque oublié le but premier de tous ces efforts et de ce (lourd) contenu technologique. Sans surprise, la C43 a sacrifié deux cylindres et une bonne partie de l'agrément moteur pour répondre aux impératifs réglementaires en matière d'émissions de CO2. Les versions AMG sont certes des variantes de niche, mais en tant que modèle de grande diffusion, la Classe C se retrouve en première ligne dans la chasse aux grammes chez Mercedes. Sur le papier, la C43 à 4 cylindres annonce 198 g / km, et 8,9 l / 100 km (nous avons relevé environ 14 l de moyenne en conduite dynamique, pas si mal vu notre rythme). Elle subit donc notre malus franco-français à hauteur de "seulement" 20.396 € en configuration de base. L'ancien V6, avec 214 g, écoperait de 34.224 € au barème 2023.       

 
Les 408 ch délivrent des chronos sérieux, le turbo électrique apporte un punch instantané... Mais aucun progrès réel par rapport au précédent V6 : malgré 18 ch de moins, il relançait plus fort. Et sonnait mieux.
Titre fiche technique
FIche technique Mercedes AMG C43 (2023)
Fiche technique
Modèle essayé : Mercedes AMG C43 (2023)
Dimensions L x l x h 4.791 x 1.824 x 1.450 mm
Volume mini / maxi du coffre 455 dm3
Empattement 2.865 mm
Poids à vide 1.765 kg
Cylindrée du moteur thermique 4 cylindres, 1.991 cm3
Puissance maximale 408 ch à 6.750 trs/mn
Couple maximal 500 Nm à 3.300 trs/mn
0 à 100 km/h 4,6 s
Vitesse maximale 250 km/h

Bilan

Ce n'est pas de la nostalgie, juste un constat très factuel : c'était mieux avant. Pour ceux qui n'ont pas connu le V6, une Mercedes AMG C 43 à "4 pattes" sera sans doute formidable. Pour les autres... Peu importe ce petit dixième de gagné. Nous ne sommes pas si pressés.

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