DACIA SPRING 65: COMMENT LA MOINS CHèRE DES éLECTRIQUES JUSTIFIE SON PRIX GONFLé

ESSAI. Déjà contraint d’augmenter ses prix pour suivre l’inflation, Dacia n’avait pas particulièrement besoin d’une Spring plus chère. Mais la clientèle réclamait davantage de punch, pour affronter les voies rapides. Des améliorations qui se paient, fatalement.

A sa sortie, en 2021, la Dacia Spring était proposée au tarif défiant toute concurrence de 15.000 euros (bonus gouvernemental non déduit). Deux ans plus tard, elle démarre à 20.800 euros mais reste la voiture électrique la moins chère du marché. Cette petite Dacia est de surcroît la seule à proposer une location de longue durée (37 mois et 30.000 km, en l’occurrence) avec un loyer inférieur à 100 euros par mois après un apport de 7.500 euros. Très exactement 99 euros, une fois déduits les 5.000 euros du bonus écologique et les 2.500 euros de la prime à la conversion (pour qui met au rebut un Diesel d’avant 2011 ou une essence d’avant 2006).  

Cet atout prix vaut à la Dacia Spring de se maintenir depuis janvier sur la plus haute marche du podium des ventes de voitures électriques en France, devant la Peugeot e-208 (source : Avere-France). Depuis la date de son lancement, en 2021, la Spring a enregistré près de 110.000 commandes en Europe, dont plus de 43.000 en France. Un succès qui “dépasse nos espérances”, confirme Matthieu Baron, Directeur de Programme Dacia Spring. 

Plus puissante, la Dacia Spring 65 ne remplace pas la 45, qui reste au catalogue avec 20 chevaux de moins

Cette position de force est cependant menacée par l’arrivée de concurrentes à bas coût venues de Chine, pays d’origine de la Spring assemblée dans l’usine DongFeng, aux côtés de sa cousine chinoise, la City K-ZE. Plus grave, les origines exotiques de la petite Dacia pourraient lui faire perdre le bénéfice de tout ou partie du bonus gouvernemental. Le ministère de l’Économie et des Finances expliquait le 17 mai dernier travailler à un mécanisme qui permettra, suivant la volonté du gouvernement, de “conditionner le versement de cette aide publique au respect d’un critère environnemental”.  

Bercy doit élaborer un modèle capable d'évaluer l'empreinte carbone de la construction d'un véhicule, "de la batterie à la construction du moteur". Voilà qui reviendrait à réserver les 5.000 euros du bonus “aux véhicules électriques fabriqués en Europe”. 

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Face à cette menace, le Directeur commercial France de Dacia affiche sa sérénité. “Si les voitures importées de Chine venaient à être privées de cette subvention, il nous faudrait adapter notre offre”, concède Thomas Dubruel. “Mais à l’heure où je vous parle, Bercy ne nous a transmis aucun texte, aucune instruction quant aux conditions d’application de cet éventuel nouveau barème du bonus qui sera discuté à l’automne, dans le cadre du projet de loi de finances.” Et puis Dacia s’estime moins exposé que d’autres constructeurs. “Il y aura toujours une place pour la Spring, même plus chère de mille ou de deux mille euros.”, affirme Thomas Dubruel en référence aux rivales toutes vendues plus de 25.000 euros (Renault Twingo E-Tech et Leapmotor T03). 

Malgré sa puissance accrue, la Spring 65 embarque la même batterie que la variante 45

Certes, la production de la Spring et de sa batterie consomme une énergie électrique réputée moins vertueuse (en termes d’émission de carbone fossile) que celle générée par nos centrales hydrauliques et nucléaires françaises. Toutefois Thomas Dubruel aime à rappeler que la Spring a été élue en février “meilleure voiture verte” par l’organisme Green NCAP, qui la place au meilleur niveau tant en matière d’émissions de gaz à effet de serre et de polluants, que d’efficacité énergétique. “C’est là le fruit de notre approche frugale de la voiture essentielle, qui fait de la Spring l’une des électriques les plus légères et les plus économes”, se félicite le constructeur. 

Dès lors, pourquoi risquer d'entamer une réputation si flatteuse en proposant une variante plus puissante de la Spring, potentiellement plus vorace en énergie ? La réponse ne fait pas mystère : “La clientèle nous réclame davantage de vigueur à l’accélération comme en reprise, afin d’affronter plus sereinement les voies rapides”, révèle Thomas Dubruel. Les ingénieurs se sont donc mis au travail, avec la contrainte d’une batterie inchangée, afin “de ne pas grever le prix de revient ni alourdir l’auto”. 

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La réserve d’énergie reste fixée à 26,8 kWh, mais le conducteur a tout loisir de la consommer plus rapidement, dès lors que son pied droit s’avise d’exploiter le surcroît de couple fourni à la roue : pas moins de 672 Nm, contre 452 Nm sur la Spring 45. La différence se ressent plus nettement à la reprise pour passer de 80 à 120 km/h, exercice qui ne prend officiellement plus que 13,5 secondes, contre 26,2 secondes sur la version 45. Voilà qui permet de s’insérer avec davantage de sérénité devant un semi-remorque.  

La conduite de la Dacia Spring se fait plus sereine

Les sueurs froides qui douchaient l’enthousiasme du conducteur à l’approche des premiers virages serrés ont sérieusement perdu en intensité, elles aussi. Les modifications apportées aux amortisseurs et à la direction (la Spring 45 en profite en même temps que la 65) confèrent à la fois une meilleure tenue de cap à haute vitesse et un meilleur filtrage des pavés en ville. Mais la Spring n’en reste pas moins une petite auto légère, étroite et haute sur roues, qui n’apprécie pas le vent de travers. 

Comparée à la Dacia Spring 45, l’autonomie officielle de la variante 65 perd 10 kilomètres sur le cycle mixte WLTP (220 kilomètres). Mais elle reste identique en ville, à 305 km. Sur un parcours de 100 kilomètres mêlant routes de campagne et voies rapides, nous avons relevé une moyenne de 9,7 kWh/100 km (9,5 kWh/100 km en ville et 11,5 kWh/100 km à 110 km/h).  

Une vigueur et une polyvalence accrues ne sont pas les seuls attraits de la Dacia Spring 65 : cette variante vendue 22.300 euros n’est commercialisée que dans la nouvelle finition haut-de-gamme “Extrême”, refusée à la Spring 45 (de 20.800 à 22.100 euros). Préparez-vous à baigner dans le luxe : teinte exclusive “Bleu Ardoise”, éléments de décoration en brun cuivré, tapis en caoutchouc avec motifs “topographiques”, évoquant les courbes de niveaux. En plus du GPS intégré et de la climatisation manuelle déjà proposés sur le niveau “Expression”.

Paradoxe, le moteur de la Spring 65 délivre moins de couple que celui de la Spring 45 

Matthieu Baron s’épuise à l’expliquer : “Le moteur de la Spring 65 et 45 vient du même fournisseur. Au contraire du réducteur de la 65, fourni par un équipementier chinois, quand celui de la 45 vient d’Inde.” S’il tient à cette précision, c’est pour détromper ceux qui affirment que le surcroît de couple offert à la Spring 65 provient d’un tout nouveau moteur. “Nous nous sommes contentés d’augmenter le bobinage du rotor, pour faire passer davantage de courant et accroître la vitesse de rotation (de 8.000 tr/min, elle passe à 14.000 tr/min).” Problème, la valeur de couple en sortie d’arbre moteur diminue avec la hausse de régime : de 125 Nm sur la version 45, elle n’est plus que de 113 Nm sur la 65. En réponse, “nous avons changé le réducteur en ajoutant des dents sur les quatre pignons.” Le rapport de démultiplication passe ainsi de 7,162 à 12,057. Le surcroît de vitesse du moteur est alors transformé en surcroît de couple délivré à la roue (672 Nm au lieu de 452 Nm). CQFD.

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