VOITURE éLECTRIQUE: POURQUOI LES CONSTRUCTEURS ADOPTENT UN STYLE CONSENSUEL

Dans le monde de la mobilité électrique deux approches s'affrontent: tout faire pour que les voitures vertes se remarquent ou bien gommer tout signe distinctif, pour rassurer le client.

L'électrique est-elle une voiture comme une autre? La question n'est pas que pure sémantique car, de l'aveu même des constructeurs, le style demeure la première motivation d'achat de la clientèle.

Inspirés par le succès planétaire de la Toyota Prius, une hybride essence-électrique réputée pour son allure, disons... étrange autant que pour sa sobriété énergétique, les pionniers de l'électrique que sont Renault et BMW ont choisi de donner un style à nulle autre pareille à leurs ZOE et i3 lancées respectivement en 2012 et 2013. Dix ans plus tard, toute la question est de savoir si l'électrique doit se faire plus discrète pour augmenter sa diffusion et accélérer sa banalisation.

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Une chose est sûre, le temps des pionniers est révolu. D'après l'Association des Constructeurs européens d'automobiles (ACEA), au mois d'août, la part de l'électrique dans les immatriculations européennes dépassait pour la première fois les 20%.

BMW fait le choix de l'uniformité

Contraints d'accroître cette proportion en préparation de l'interdiction à la vente en Europe des véhicules neufs à motorisation thermique, "les constructeurs ne s'adressent plus à une poignée de technophiles faiseurs de tendances mais à Monsieur et Madame Tout-le-Monde", constate Jamel Taganza, du cabinet d'experts Inovev. D'où la tentation d'habiller leurs électriques dans un style plus consensuel.

Certains, à l'image de Peugeot et de BMW vont jusqu'à proposer tous les types de motorisation (électrique et thermique) sur un seul châssis habillé de la même carrosserie. D'autres - à l'instar de Mercedes et de Renault - persistent à développer deux gammes parallèles.

Les frontières entre les deux camps s'avèrent poreuses, signe des hésitations du moment. D'abord chantre de la séparation des genres, BMW change son fusil d'épaule et donne une seule et même carrosserie à toutes les variantes de sa nouvelle berline Série 5.

"L'électrique ne se distingue qu'à la teinte bleue de son badge, à la demande des services de secours qui interviennent en cas d'accident", confirme Matthias Göbel, chef de produit BMW Série 5. Le choix de cette uniformité se justifie par la "volonté de ne plus contraindre le client à faire un choix parfois difficile entre deux styles". Et comme toutes les Série 5 sont construites sur un même châssis, "les ingénieurs ont pu faire en sorte que l'électrique soit aussi plaisante à conduire que les autres".

Une rentabilité moindre

Peugeot enfonce le clou. "Nos clients réclament une électrique qui ne se fait pas remarquer." C'était vrai déjà en 2019, au lancement de la petite e-208; ça l'est toujours en 2023, avec l'arrivée de la e-308 identique en apparence à ses homologues essence, diesel et hybride.

THERMIQUE Peugeot 308 (2021)

Moteur: Essence, Diesel ou hybride.

Puissance: 110 à 225 chevaux.

Autonomie électrique: 66 km (hybride rechargeable).

Prix: à partir de 29.480 euros.

ÉLECTRIQUE Peugeot e-308 (2023)

Puissance: 156 chevaux.

Autonomie électrique: 413 km.

Prix: à partir de 43.900 euros.

D'un point de vue industriel, l'avantage est significatif. Parce qu'elles sont construites sur une même plateforme dite multi énergies, les variantes d'une Peugeot tombent toutes de la même chaîne, "ce qui permet d'ajuster la production aux fluctuations de la demande". Une flexibilité vantée aussi par BMW, au prétexte que "personne ne sait quelle sera la part de marché des électriques dans cinq ans".

L'argument est retourné par Mercedes-Benz, qui soutient que les robots de son usine de Sindelfingen sont capables d'assembler tous les genres de véhicules, de la citadine au SUV, qu'ils soient électriques ou bien thermiques. Renaut n'en démord pas et considère que la meilleure manière de répondre aux variations du marché est de développer des plateformes spécifiques.

THERMIQUE Mercedes Classe E (2023)

Moteur: Essence, Diesel ou hybride.

Puissance: 136 à 625 chevaux.

Autonomie électrique: 118 km (hybride rechargeable).

Prix: à partir de 64.750 euros.

(Photo: Mercedes-Benz)

La rentabilité est peut-être moindre, "du fait de séries moins importantes et de coûts de développement supplémentaires", mais en retour "les prestations sont meilleures". Car une plateforme dédiée "permet de tirer le plein parti des atouts la traction électrique" pour optimiser la masse, l'autonomie et le rapport entre encombrement et habitabilité. Reste à voir si ces avantages suffiront à convaincre le consommateur à payer un peu plus cher son électrique.

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